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Les prokinéticines dans les pathologies de la grossesse

Publié le 24 avril 2024
Responsable du projet 

Nadia Alfaidy


Le projet​ scientifique porté par le Dr Nadia Alfaidy, DR2 Inserm et responsable de l’équipe MAB2, s'inscrit dans la continuité de la thématique qu’elle a proposé lors de son recrutement à l'Inserm en 2005. Son projet est principalement axé sur l'étude des pathologies de la grossesse. Le Dr Alfaidy s’intéresse en particulier à l’étude de deux pathologies non tumorales de la grossesse, la pré-éclampsie (PE) et la prématurité (PTB), et à une pathologie tumorale du placenta, le choriocarcinome gestationnel (CG), un cancer malin qui survient suite à des grossesses anormales. Contrairement à la PE qui est causée par une invasion superficielle du trophoblaste dans la décidue « partie de l’endomètre transformée », entraînant un échec de l'établissement de la circulation fœto-maternelle, le CG est associé à une invasion excessive du trophoblaste. Le PTB quant à lui survient le plus souvent suite à une infection bactérienne et de façon spontanée.
Le Dr Alfaidy étudie ses pathologies en lien avec les prokinéticines (PROKs), une nouvelle famille de facteurs pro-inflammatoires et pro-angiogéniques. Cette famille a été découverte en 2001 et le Dr Alfaidy a débuté leur dans ces pathologies depuis 2003. La centralisation de ses projets sur l’étude des prokinéticines tout au long de cette période a fait de son groupe et récemment équipe un centre incontournable de l'étude des PROKs à l’international.

Famille des Prokinéticines



La famille des PROKs est composée de deux membres, PROK1 également appelé EG-VEGF (Endocrine Gland derived-Vascular Endothelial Growth Factor) et PROK2 également appelé BV8 (Bambina Variegata). Les membres des PROKs présentent des profils d'expression différents et des sites d'action préférentiels. Alors que PROK2 est associé au système nerveux, PROK1 est associé à l'appareil reproducteur et aux organes endocriniens. Les récepteurs PROKs (PROKR1, PROKR2) sont couplés aux protéines G, et lient PROK1 et PROK2 avec des affinités quasi-similaires. Ces récepteurs sont les médiateurs des réponses angiogéniques et inflammatoires des deux ligands.
Les études récentes obtenues de ce groupe ont démontré que des dérégulations dans l’expression des membres de la famille des PROKs sont étroitement associées au développement de la PE, le PTB et le CG.

Stratégies et Implémentations



     Prokinéticines dans la Pré-éclampsie
Le groupe du Dr Alfaidy a identifié EG-VEGF/PROK1 comme biomarqueur potentiel de sa survenue et a démontré que le maintien de sa production placentaire au-delà du premier trimestre de grossesse contribue au développement de la PE chez la souris. Ces travaux ont été publiés dans la revue Hypertension en 2016. Depuis 2015, son groupe a publié 26 articles sur les mécanismes de fonction de ce ligand en lien avec cette pathologie. Dans le cadre de ce projet, le groupe qui inclut quatre cliniciens en obstétrique et gynécologie a développé trois études cliniques (NCT014490489, NCT00695942, NCT05188066)​ et démontré le potentiel thérapeutique de l’antagonisation des récepteurs de PROK1. Dans ce contexte le groupe est soutenu par Inserm Transfert pour le développement d’un anticorps bloquant de PROK1. Les études sont en cours pour porter ces études vers la clinique.


     ​Prokinéticines dans la Prématurité
La prédiction des naissances prématurées chez les femmes asymptomatiques reste un grand défi pour le système de santé publique. Les naissances prématurées spontanées (sPTB) dues au déclenchement spontané du travail représentent 40 à 45 % de toutes les naissances prématurées et sont considérées comme la principale cause de mortalité et de morbidité néonatales. Prédire sPTB chez les femmes asymptomatiques reste un défi majeur pour les cliniciens. Le Dr Alfaidy s’intéresse à la problématique de la prématurité depuis son stage post-doctoral à l’Université de Toronto. Cet intérêt s’est poursuivi dans le Laboratoire Inserm qu’elle a rejoint en 2003 à Grenoble. L’étude de cette pathologie et est aujourd’hui au cœur de des activités de son groupe et de l’équipe qu’elle dirige. La consolidation du travail sur la prématurité a été consolider grâce à l’intégration de son équipe par une clinicienne spécialisée dans les pathologies à haut risque, le Pr Tiphaine Barjat. En 2021, l'équipe a démontré dans le cadre de l'essai clinique (NCT00695942- Pr Barjat) que PROK1 est un biomarqueur fiable de la sPTB dès la 20ème semaine de grossesse (brevet international-EP 22305143.4). L'équipe a également démontré que les PROKs sont directement impliqués dans l'inflammation placentaire associée au sPTB, avec des conséquences directes sur le développement du cerveau fœtal. Grâce à ce résultat, Inserm Transfert a financé l’équipe MAB2, en 2024, pour la validation de la valeur informationnelle de PROK1 en tant que biomarqueur du sPTB​ et de développer des outils thérapeutiques en lien avec sa signalisation pour atténuer les handicaps associés à cette pathologie. Ce projet est mené par deux doctorantes, Morgane Desseux (Thèse financée par Focus Biomarqueurs-CEA) et Margaux Digonnet (Thèse financée par une collaboration internationale France-Canada).

     Prokinéticines dans deux cancers de la femme
De par la similitude entre les processus d’invasion trophoblastiques et ceux des cellules tumorales, le placenta humain peut être qualifié d’une tumeur. Néanmoins, cette invasion est contrôlée dans le temps de l’espace. Dans certains cas ces trophoblaste dotés de cette aptitude peuvent se transformer en cellules tumorales. Cette situation est observée dans le cas du choriocarcinome gestationnel (CG), cancer qui se développe le plus souvent suite à des grosses anormales dénommées, môles hydatidiformes (MH). Au cours des dix dernières années, le groupe du Dr Alfaidy s’est intéressé à l’étude de ce cancer en lien avec les prokinéticines. Le groupe a
i) démontré que la PROK1 et son récepteur PROKR2 sont augmentés chez les patientes atteintes de CG (cohorte issue d'une collaboration internationale),
ii) développé un modèle orthotopique de CG chez la souris (technologie protégée) et i
ii) utilisé ce modèle pour démontrer que l'antagoniste du PROKR2 pourrait être considéré comme une cible thérapeutique potentielle pour le traitement de ce cancer (données brevetées). Ces travaux ont été publiés dans le journal Clin Cancer Res, 2017. Par ailleurs, s’intéresse à la protéine NLRP7, membre de la famille des inflammasomes dont le gène est muté dans plus de 50 % des MH. En 2017 et 2019 une doctorante, D. Reynaud, et un post-doctorant, Dr R. Abi Nahed ont caractérisé le rôle de cette protéine dans les grossesses normales, dans les grossesses pathologiques (retard de croissance intra-utérin (RCIU)), et dans le CG. Une partie des travaux de ces deux chercheurs a été récemment publiée dans le journal Cancers et fait la couverture de ce journal.
Le système PROK étant fortement exprimé dans l’ovaire, le groupe du Dr Alfaidy étudié l’implication du membre PROK2 et son récepteur PROKR1 dans le cancer de l’ovaire. Ce projet est mené en collaboration et le Pr S Conlan de l’Université de Swansea. Un traitement combinant la PROK2 et un anticorps conjuguée à une protéine cytotoxique sont en cours de caractérisation dans un modèle souris du cancer de l’ovaire. Ce projet est mené par la doctorante Mélanie Boudaud dont la thèse est codirigée par le Dr Alfaidy et le Pr S. Conlan.


NLRP7 fonctionne de manière dépendante de l'inflammasome dans les trophoblastes normaux et de manière indépendante dans les trophoblastes tumoraux



Étudiantes en thèse impliquées dans ce projet :


Margaux Digonnet
Caractérisation du rôle de la famille des prokinéticines dans l'infection périnatale : cas de la chorioamniotite.








Morgane Desseux
Caractérisation de la valeur informationnelle de PROK1 comme nouveau biomarqueur de la prématurité dans un contexte infectieux.








Mélanie Boudaud
Amélioration de l'efficacité des ADC dans le micro-environnement tumoral du cancer de l'ovaire.