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Fait marquant

Nicotine au cours de la grossesse : vers un mécanisme d’action



Nous venons de démontrer que les effets de la nicotine sur le développement embryonnaire seraient dus à des effets directs de cette molécule sur le développement et la vascularisation placentaire.

Publié le 27 février 2014
L'exposition à la nicotine au cours de la grossesse augmente le risque de la prématurité et serait étroitement associée au retard de croissance intra-utérin (RCIU). En France, plus d'une femme enceinte sur 5 fume tout au long de sa grossesse, augmentant le nombre de bébés intoxiqués in utero. La prévalence du RCIU passe de 8,5 % pour les non-fumeuses à 14,7 % pour une consommation de 1 à 5 cigarettes par jour et à 18,7 % si elle dépasse 10 cigarettes par jour. Le mécanisme d’action de la nicotine reste à ce jour mal connu.

Dans le modèle de la rate gestante, le groupe du Dr A. Holloway à l’université Mc Master au Canada, a récemment confirmé [1] l’association entre l’exposition à la nicotine, avant et pendant la gestation, et le RCIU. En collaboration avec ce groupe, nous venons de démontrer [2] que les effets de la nicotine sur le développement embryonnaire seraient dus à des effets directs de cette molécule sur le développement et la vascularisation placentaire, phénomènes ayant pour conséquence la dérégulation de l’établissement de la circulation fœto-maternelle au début de la grossesse.

Nos expériences, menées in vivo montrent que la nicotine inhibe l'invasion trophoblastique interstitielle, augmente l'hypoxie placentaire et diminue la vascularisation de la zone d’échange fœto-maternelle. Ces effets sont accompagnés de dérégulations de facteurs de transcription-clés de la différentiation cellulaire, ainsi que d’une diminution du facteur angiogène placentaire EG-VEGF. Les expériences in vitro ont confirmé les effets inhibiteurs de la nicotine sur la migration, l’invasion et la différenciation trophoblastique. Nous avons de plus montré que ces effets passent par une inhibition des métallo-protéinases MMP2 et MMP9, enzymes qui contribuent à l’invasion trophoblastique ; et par une dérégulation de l’expression des récepteurs à la nicotine.

L’ensemble de ces données suggère que les effets néfastes du tabagisme maternel sur l'issue de la grossesse seraient en partie dus aux effets directs de la nicotine sur les principaux processus du développement placentaire et de l'établissement de la circulation fœto-maternelle.

A - Placenta normal de rate gestante Wistar. Les cellules à glycogène (pointillés en noir) sont bien différenciées et invasives.
B - Placenta de rate Wistar traitée de la deuxième semaine avant l'accouplement jusqu'à la mi-gestation avec 1mg/kg de nicotine. Les cellules à glycogène sont non différenciées et peu invasives.

Au cours de la grossesse, il se produit une invasion trophoblastique des artères spiralées qui les transforment en vaisseaux à basse pression et haut débit, assurant l’établissement de la circulation fœto-maternelle.
Hypoxie placentaire : diminution physiologique de l’oxygénation du placenta.
EG-VEGF (Endocrine Gland-derived Vascular Endothelial Growth Factor) est un facteur angiogène (croissance de nouveaux vaisseaux) ainsi qu’un facteur de croissance du placenta dont la dérégulation dans le RCIU suggère qu’il pourrait servir de marqueur précoce prédictif de cette pathologie et être utilisé comme cible thérapeutique potentielle.

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